Histoires de mots - 7 septembre 2015 - 2 min

Infidélités mythologiques

L’infidélité conjugale ne date pas d’hier. À preuve, les mythologies grecque et romaine fourmillent d’histoires d’adultère. Le français moderne en porte parfois une trace imperceptible. Qui sait, par exemple, que sous les noms communs sosie, amphitryon et hercule se cache une croustillante histoire d’infidélité, de tromperie, de meurtre et d’inceste digne des meilleurs feuilletons à scandale modernes ? Levons le voile sur ce charmant tableau de famille…

sosie, amphitryon

Les personnages de Sosie et d’Amphitryon sont étroitement liés. Sosie (en latin : Sosia, du grec Sôsias) était l’esclave d’Amphitryon dans la pièce de théâtre du même nom de Plaute, auteur comique latin. Inspirée d’œuvres grecques antérieures, cette pièce en inspira d’autres, dont les Sosies de Rotrou (1636) et Amphitryon de Molière (1668).

Dans l’œuvre de Plaute, afin de séduire une femme mariée, Jupiter et son fils Mercure prennent respectivement les traits de son époux (et oncle !) Amphitryon, roi de Tirynthe, et de son esclave, Sosie, pendant leur absence. Alors que le faux Amphitryon organise un grand banquet chez le vrai, ce dernier parait, stupéfait de se voir lui-même. Traitant Jupiter d’imposteur, il est contredit par le vrai Sosie qui affirme que le véritable Amphitryon est celui qui a généreusement offert ce banquet. Amphitryon obtiendra la confirmation douloureuse de l’infidélité involontaire de sa femme, qui enfantera le célèbre Hercule.

La ressemblance parfaite entre Mercure et Sosie a engendré le nom commun sosie, usité depuis le XVIIIe siècle dans son sens toujours actuel de ‘personne qui ressemble parfaitement à une autre’. Cet emploi moderne a été concurrencé au début par ceux de ‘déloyal’ et, sous la plume de Voltaire, de ‘imposteur’, maintenant disparus. Le nom commun amphitryon, apparu à la même époque, évoque la générosité du faux Amphitryon et de son banquet, avec le sens de ‘hôte offrant à diner’.

hercule

Dans la mythologie gréco-romaine, Hercule était un demi-dieu à la force surhumaine. Il était issu des amours extraconjugales de Jupiter et d’Alcmène, épouse du roi Amphitryon. Hercule fit usage de sa force extraordinaire au cours de ses nombreux exploits, dont les Douze Travaux, qu’on lui imposa pour expier le meurtre de sa famille, qu’il avait commis dans un accès de folie provoqué par Junon (ou Héra, chez les Grecs), l’épouse trompée (et sœur !) de Jupiter. Le cinquième des Douze Travaux est à l’origine de l’expression écuries d’Augias, évoquant un lieu d’une malpropreté repoussante. Hercule avait pour tâche de nettoyer en un jour les écuries infectes du roi Augias, qui ne l’avaient pas été depuis trente ans.

La force surhumaine d’Hercule est rappelée par le nom commun hercule qui est usité depuis le milieu du XVIe siècle avec son sens toujours actuel de ‘homme d’une très grande force physique’. Elle est rappelée aussi par l’adjectif herculéen, créé à la même époque et qui, après une période d’absence, refait son apparition au début du français moderne.

Le nom latin d’Hercule, Hercules, est l’adaptation de la forme étrusque Herac(e)le, empruntée au grec Hêraklês. Le nom grec de ce héros, composé des mots Hêra ‘épouse de Zeus (ou Jupiter, chez les Romains)’ et kleos ‘gloire’, signifierait ‘gloire d’Héra’. Un honneur plutôt étrange quand on connait la haine que portait Héra à ce fils illégitime !

Cet article a été concocté par
les linguistes d’Antidote

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